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Chers parents, l’homophobie tue vos enfants
Crédit: Pamela Lajeunesse / Nightlife.ca

Je suis gai depuis que j’ai vu le jour, c’est dans mon ADN. Point final.

Je viens d’une époque où être gai était réservé aux coiffeurs, aux infirmiers et aux artistes. Je savais que je n’empruntais pas le chemin de la facilité ni celui de la voie tracée pour la popularité et de l’acception générale.
 
Comme dans un précédent texte où je faisais état de mon parcours, mon coming out s’est passé sans vraiment de heurt. J’ai eu droit à de la compréhension et à beaucoup d’amour de la part de ma famille et de mes amis. Ce qui n'est pas donné à tout le monde. Être de cette minorité (qui n’a franchement rien de minoritaire, bien au contraire, tout est grandiose) m’a permis de m’épanouir, grandir et de m’ouvrir sur le monde comme jamais je ne l’aurais cru possible. Surtout, j’ai pu me lier d’amitié avec des gens aux couleurs et aux personnalités flamboyantes.

Alors, comment se fait-il qu'au premier abord, dans un monde clos et mis en marge, l’ouverture d’esprit et la tolérance envers les genres et la diversité soient si grandes? Comment se fait-il que le vaste monde – celui de ladite «normalité», celui du droit chemin, celui tracé par la «majorité» – soit fermé et hermétique?
 

Crédit Photo: Jean-Pierre Desnoyers

Un jour arrive le beau moment de l’adolescence.

Ce moment où les hormones se réveillent, ou la machine humaine crée des mutants et des boutons à n'en plus finir. Les bras poussent plus vite que le reste, la voix change, les premiers signes de pilosité apparaissent, mais surtout arrive la conviction pure et dure que l'on pense posséder la raison et le savoir sur tout!

Alors arrive dans le décor le mâle alpha. Je vais l’appeler Roger. Roger m’en a fait baver un certain temps. Roger a décidé que je serais son « sous-fifre ». Il a 17 ans et j’en ai 13.

J’ai peur. Je longe les couloirs. Je prends des trajets de bus différents pour ne pas le voir à la sortie des cours. Je change d’école.
 
Dix ans plus tard, je le recroise dans une soirée d’Halloween. Je suis déguisé, il ne me reconnait pas. Il est avec des amis. Il me parle et m’offre un verre que je refuse avec conviction. Je lui rappelle mon histoire.

Je lui explique la présence qu'il a eue dans ma vie. Il me fait des excuses.

Je lui demande s'il a des enfants. «Oui, un fils de de 4 ans» me dit-il.

Je lui dis alors que je souhaite à cet enfant de ne jamais rencontrer un garçon comme son père a été. Son fils en garderait des marques à jamais. Probablement qu'il en serait blessé à vie. Comme je l'ai été.

Cette fois-ci, il s’est confondu en excuse en pleurant comme un enfant. Je lui ai demandé de me jurer que si un jour il voyait un acte comme ceux qu'il m’a fait subir, de se porter au secours du plus faible.
 

 
Je crois que tout passe par l’éducation, la démystification, et ce, dès le plus jeune âge. Je ne me souviens plus exactement dans quels mots, mais c’est Jeannette Bertrand qui m’a parlé la première fois de ce qu'était être un homosexuel (à travers son livre, bien sûr). Je n’avais pas tout saisi, mais au moins, j’avais une base.

Je savais que je n’étais pas un monstre.
 

À tous les futurs parents, à tous ceux dont le fait d’être gai ne leur dérange pas, à tous ceux qui affirment que si leurs enfants seraient gais qu’ils les aimeraient pareil et même plus fort! Je vous applaudis.

De plus, je vous fais un standing ovation si vous leur enseigner la tolérance et l’ouverture d’esprit même avant que leur choix d’orientation soit dans l’ombre de ce dernier. Car le secret est dans l’exemple. Je pourrais ajouter des exemples: respecter les autres dans toutes les différentes sphères, les gens aux différentes physionomies, ceux qui sont à mobilité réduite, ceux qui s'habillent différemment, ceux qui ont une couleur de peau différente et j’en passe.

Car c’est justement cette différence qui fait que nous sommes uniques et si précieux !

Crédit Photo: Jean-Pierre Desnoyers

Merci à tous ceux qui sortent de l'ombre, ceux qui parlent haut et fort, qui, dans leur démarche naturelle, deviennent un exemple pour tous ceux qui ne croient pas que c'est possible. Merci à tous ceux qui supporte et qui cautionne la cause. Merci à ceux qui sont à nos côtés par convictions et amitié. 

Grâce à vous, le mot «communauté» prend une autre forme, mais surtout, il devient plus fort.
 
Je vous laisse avec un lien vers un album photo de la vigile qui s'est tenu hier à Montréal, le 16 juin 2016, à la mémoire des victimes de l'attentat d'Orlando du 12 juin 2016 et termine sur cette citation qui, dans un tel contexte, prend tout son sens.

« Il est malheureux que les gens ne voient que les différences qui les séparent. S'ils regardaient avec plus d'amour, ils discerneraient surtout ce qu'il y a de commun entre eux, et la moitié des problèmes du monde seraient résolus. »

Paulo Coelho ; Manuel du guerrier de la lumière, (1997)
 

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