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L’homophobie entre les gais, ça existe #masc4masc

Définition de Masculinité : «Pour un groupe donné, rapport des effectifs des individus du sexe masculin à ceux du sexe féminin.»Larousse

Okay, jusque-là, ça va. Il y a une différence entre un gars et une fille. On est tous d'accord.

Que diriez-vous si je vous disais qu’au sein même du groupe d’individus de sexe masculin, il existait une nouvelle règle qui mesure la masculinité?

Mettons qu'on jase, de Queen à Masc, vous vous situez où? 

«Queen», «fem», «maniéré», «masc», «masc4masc», «actlikeastraight», etc. ce sont tous des mots que l’on retrouve dans la description de profil de plusieurs gars sur les réseaux sociaux de rencontres gaies comme Grindr, Hornet, Scruff, Tinder, etc. 

#Masc4Masc voilà un hashtag intéressant. Ce terme désigne une personne qui se définit comme un homosexuel masculin, mais qui est attiré uniquement par les homosexuels masculins.

«WTF?!», me direz-vous.

Tous les gais qui liront ce texte comprendront pourquoi j’en parle, pour les autres, entrons dans le vif du sujet.

TU N'ES PAS COMME LES FIFS!

Je vais remonter à plusieurs années. Quand j'ai fait mon coming out à l’âge de 18 ans. On m’a épargné toute mon enfance et mon adolescence. Je n'ai subi aucune intimidation, seulement des regards ou des commentaires camouflés. Je sors donc du placard et ce n'est pas une grande surprise dans la communauté Rouyn-Norandienne d'où je viens. Ça passe et même plus que bien! 

« Tsé toi, Jérémy, tu es gai, ce n’est pas comme ton ami, lui, il est vraiment fif » 

Au début, OK. Je vais prendre le compliment, mais après le 10e commentaire de la sorte, je me pose beaucoup de questions. Pourquoi avec mon copain ça ne passe pas et avec moi oui? Évidemment, sans trop de surprises, mon ami est plus «efféminé», plus excentrique et plus marginal que moi. Il est différent de la masse. 

J’ai pété une solide coche.

J’ai dû rectifier certaines choses avec mes amis et je leur ai expliqué ma vision des choses. Évidemment, ce qu'ils disent, ça ne se dit juste pas! C’est de l’homophobie. Point. 

BREF. Quelques années plus tard, je déménage à Montréal. Enfin, je peux télécharger et utiliser Grindr et cie. Je réalise vite que cette idée de catégoriser les homosexuels est déjà bien présente sur les applications de rencontres gaies. Mais est-ce donc de l’homophobie? Au sein même de cette communauté?

Ça cogite donc dans ma tête depuis longtemps. J’ai donc décidé de mener ma propre enquête (lol, pas tant que ça). Voici ce que les #masc avaient à dire. 

Conversation Hornet, 12 avril 19 h 27 (désolé pour l’orthographe):

Son profil : Cherche un gars – Queen s'abstenir […] #masc 

Moi : Tu cherches des gars #masculins, c’est quoi ton intention lorsque tu écris dans ton profil le hashtag #Masc? 
 

Crédit : Jérémy Leith

Moi : Est-ce que la féminité chez un homme te dérange? 
Masc01 : Ça me dérange pas, mais ça m'attire pas pantoute. 
Moi : Dernière question : pour toi, c’est quoi être masculin aujourd’hui?
Masc01 : Pas maniéré, l’habillement, et la voix !!!!!

(je ne pouvais pas arrêter là)

Moi : Mettons, je viens chez toi, vas-tu me poser des questions pour vérifier si je suis efféminé?
Masc01 : Oui définitivement !! Tu le vois déjà sur la photo, mais j’assure que non.
Moi : Comment tu t’en assures? M’aurais-tu appelé? 😛
Masc01 : Bin pas pour la voix 😛 j’ai tjrs des surprises. 
Moi : enfin ma dernière question : pour toi, fif et homosexuel sont-ils des termes qui désignent la même chose? 
Masc01 : non.
Masc01 : Fif : over tapette / Gay : aime les gars

Échange intéressant ou troublant. Il me décrivait finalement les vieux stéréotypes de la femme véhiculés dans la société. Il ne voulait pas rencontrer un homosexuel maniéré. My bad. 

Conversation Grindr, 12 avril 2016, 21 h 04 : 

Son profil : J’aime la masculinité, l’intelligence, les gars musclés, j’aime le gym, etc. […]

Moi : Qu’est-ce que la masculinité pour toi en 2016 et pourquoi utilises-tu le #masc?

Crédit : Jérémy Leith
 

Traduction libre : Hey, j'utilise le terme «masculin» parce que je pense que c’est la meilleure façon de décrire une certaine série de maniérismes, de voix, de comportements et de préférence que je, en règle générale, trouve le plus attirant. Pour le meilleur ou pour le pire, le mot le plus largement identifiable pour décrire ma préférence est « masculin ». Par mémoire, je ne pense pas que cela exclut nécessairement l'idée d'un certain degré de fluidité entre les genres* 

*Gender fluidity : une identité de genre mieux décrit comme un mélange dynamique entre un garçon et une fille.

Il apporte une certaine nuance dans ces propos. Pour lui, c’est seulement une façon de ne pas perdre son temps. Il a une attirance claire envers des caractéristiques comportementales bien définies qui se rapporte à la masculinité. 

Il n’en pleut pas à la tonne des profils de ce genre, mais c’est une réalité bien présente. Plusieurs n’ont pas répondu à mes questions, d’autres ont gentiment décliné ma demande en me précisant que, peu importe, nous aurions des opinions très différentes (un perspicace).

Conversation Grindr, 12 avril 2016, 21 h 15 :

J’ai eu la chance de rencontrer dans ma quête de sens, un dénommé Wesley. Il en avait long à dire sur le sujet. Il disait qu’il y a un désir pour plusieurs homosexuels de passer pour des straights

Wesley : Comme l'homosexualité devient de plus en plus acceptée et que la culture s’éloigne d'une sous-culture et se mélange au monde hétéro mainstream, je pense que beaucoup de gars gais veulent se séparer des stéréotypes des personnes homosexuelles dans les générations précédentes. Ils adoptent donc l’acte de la «masculinité» comme un mécanisme de défense, allant même jusqu'à exclure et rabaisser les hommes gais qui sont plus à l'aise avec leur sexualité.
Wesley : La vérité est, si tu t’identifies comme un gars et que tu portes une robe, tu restes un gars.
Moi : Si tu veux, on peut en discuter lors d’une date? 
Moi : SI SEULEMENT TU ES #MASC [joke]
Wesley : Lol, « masc » n’existe pas selon moi, les genres n’ont rien à voir avec ça! Et en passant, je suis Wesley.
Wesley : sure! [pour la date]


#MASC4MASC DE L'HOMOPHOBIE?

Belle rencontre virtuelle qui m’a fait beaucoup réfléchir sur le sujet et m’a possiblement donné une date. Au final, il y a un juste milieu à trouver. L’utilisation du #masc reste assez difficile à utiliser à mon avis, puisqu’elle projette une certaine fermeture assumée. 

Oui, je suis gai, mais pas comme les autres.  

L’idée de parler d’un mécanisme de défense est tout à fait appropriée, les plus grands homophobes sont généralement gais. Après des années et des années de luttes, la communauté gaie est maintenant confrontée à d’autres problématiques de ce genre. Est-ce qu’on parle d’homophobie au sein même de la communauté?

En fait, on parlerait plutôt de follophobie! 

Selon le blogue madmoizelle : «C’est le rejet d’un homosexuel maniéré, parfois extraverti, qui reprend des codes dits « féminins » dans sa manière de parler et/ou de s’habiller». Genre, je suis assez hétérosexuel pour que personne ne remarque mon homosexualité. C'est la peur de l'apparence, la peur du regard des autres. #Masc4Masc

Come on les gars, on est en 2016. On essaye de réduire les écarts entre les genres. On a des exemples hyper forts comme Laverne Cox qui tente tant bien que mal de changer les choses. On lutte contre l’intimidation, le suicide, la cyberintimidation, etc. Faites attention! Un gars qui construit son identité dans une communauté qui ne le défend pas peut se retrouver encore plus mélangé qu'au début!  

Et ce message s'adresse à tous, gai ou straight : soyez qui vous voulez et soyez fiers de qui vous êtes! 

Peace!

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