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Êtes-vous adepte de Travel Porn?

Auteur: Didier Leroux
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Êtes-vous adepte de Travel Porn?

«Le voyage, comme l'amour, représente une tentative pour transformer un rêve en réalité.»
Alain de Botton

Le présent texte s'adresse à un public de tout âge et aucune discrétion n'est requise. Effectivement, je ne tente pas de vous leurrer: cet article ne porte ni sur le tourisme sexuel, ni sur les scènes de fesses filmées sur le bord d'une plage au sable fin. Probablement désagréable pour lesdites fesses de toute façon.

Il s'agit plutôt de décortiquer ce phénomène qu'est le Travel Porn. Certains diront que ça n'existe pas, comme le Père Noël ou Alakazou. Toutefois, je contre-attaque en affirmant que cette activité est pratiquée par plusieurs d'entre nous. En surfant sur le web, en feuilletant des magazines spécialisées ou en lisant des récits stimulants. Peut-être êtes-vous vous-mêmes tombés dans ce vice globe-trotteur?

Depuis quelques années, la notion de Food Porn est ancrée dans notre quotidien. Il suffit de se lécher les babines devant une recette de Ricardo ou de saliver sur une photo Pinterest ou Instagram de tartelettes au chocolat noir et framboises pour faire partie du mouvement. Des images, de la vidéo, des écrits portant sur la bouffe qui suscitent l'excitation de nos neurones et qui repoussent les limites de notre imaginaire gastronomique. 

Plusieurs des photographies de ces délicieux plats qui croisent notre regard sont photoshoppées pour les laisser paraître sans aucun défaut, voire presque irréels. Gageons que les heureux propriétaires du livre de cuisine de Marilou aiment seulement regarder les images en fantasmant qu'un jour, ils cuisineront cette beauté de crème de chou-fleur rôti. Quand vous regardez Louis-François Marcotte à la tivi en train de manipuler sensuellement cet économe sur une patate, prenez-vous des notes sur la recette qu'il est en train d'exécuter ? Me semble oui… bande de voyeurs fin gourmets!

C'est pareil pour les voyages. Pensons aux chaînes de télé spécialisées comme Explora et Évasion avec une Tamy Emma Pépin qui nous dévoile les charmes des UK ou les gars de OuiSurf qui rident les vagues sud-africaines les muscles à l'air. Comme les chefs télévisuels, ces jeunes gens nous font rêvasser d'endroits enchanteurs et d'expéditions uniques. À chaque destination de leur périple, l'expérience de ces voyageurs-présentateurs est toujours surfaite, car ils semblent connaître les locaux qui facilitent leur voyage et leur font découvrir la culture et les paysages comme s'ils étaient les premiers amis Facebook qu'ils ont ajoutés en 2007.

Côté photographies, on s'abreuve de plages indonésiennes, de steppes mongoliennes, de savanes tanzaniennes et de centres urbains asiatiques maquillés de néons flash. Chacun aura ses préférences, mais il n'en demeure pas moins que ces photos sont retouchées pour nous séduire davantage. Plus de violet dans le coucher de soleil sur la côté australienne, ajoutons une goutte de rosée sur ces tulipes hollandaises et n'oublions pas d'augmenter la luminosité sur ces légumes d'un marché thaïlandais. Nos destinations rêvées s'exposent ainsi sur Instagram, Facebook, Google Images et Pinterest. Tentatrices du yâble!

Enfin, les récits de voyages qu'on retrouve sur les blogues et les forums ne font qu'intensifier notre désir ardent de partir. Nous consommons ces médias pour nous enivrer et nous faire fantasmer pendant notre semaine de travail 9 à 5, pour s'évader vers ces contrées élognées. Une fois en voyage, nous saisissons les meilleurs clichés possibles pour rivaliser avec les photoshoppés en les postant sur Facebook. Il sera difficile, mais pas impossible, d'obtenir ce voyage parfait qui nous a fait tant rêver les mois avant de se rendre à P.E.T.

Crédit: AP

Je plaide coupable, je consomme énormément de Travel Porn. En ce moment, disons que la Crête, les Cyclades et la métropole turque, Istanbul, siègent au sein de ma barre des favoris. Avec cette température de glaçons s'inscrustant dans la barbe, je ne peux qu'imaginer l'explosion d'utilisation d'Internet chez mes pairs. Aucune gêne, les britanniques passent près de 20 heures/semaine à s'exciter sur leurs prochaines vacances à l'étranger.

Malgré cette pression d'effectuer le plus meilleur beau voyage que crée le Travel Porn, je crois qu'il reste adéquat et sain pour se préparer à un éventuel départ ou, tout simplement, il permet de daydreamer son prochain séjour en terres inconnues.

Longue vie au Travel Porn!

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