Mounir Fatmi est un artiste d'origine marocaine que j'aime bien suivre. Il travaille principalement dans les villes de Tanger et Paris. Assez versatile, il oeuvre dans la réalisation vidéo, la sculpture, le dessin, la peinture, ou les installations de plus grande envergure. Son travail mise principalement sur la désacralisation des objets religieux, qu'il mélange à des produits de consommation, afin d'en faire une critique sociale. Une pièce qui m'a beaucoup plû et qui m'a marquée, en 2010: Maximum Sensation.
Pour réaliser son oeuvre, Fatmi utilise deux objets qui, à première vue, n'ont absolument aucun lien: des tapis de prière musulmans et des planches de skate. Dans une grande salle, une cinquantaine de skateboards sont recouverts de tapis religieux.
Mis à part le fait que l'oeuvre soit très cool à regarder, esthétiquement, le concept derrière tout cela est encore plus intéressant. On y décèle plusieurs aspects à investiguer. Pour commencer, il y a une certaine ressemblance au niveau du dévouement: tout comme les croyants, les riders mettent en quelque sorte le skate au centre de leur vie. Pour plusieurs, ça va jusqu'à devenir un style de vie, une religion. Les deux disciplines peuvent devenir un sanctuaire pour le pratiquant, un espèce d'échappatoire face à la vie qui peut parfois être décevante. C'est ce que l'artiste a voulu présenter en premier lieu. Dans le même sens, les deux individus tentent sans cesse d'atteindre un niveau de dépassement et d'épanouissement. Faire en sorte de ressentir au max les sensations. La planche de skate représente également un symbole de jeunesse, de liberté et de plaisir, ce qui envoie un clin d'oeil aux jeunes qui sont en train de se libérer des dogmes religieux, dans plusieurs pays orientaux.
Mounir Fatmi tente également de mettre de l'avant le phénomène de mondialisation à travers son oeuvre. Avec la possibilité d'être en perpétuelle connexion avec le reste de la planète – que ce soit de manière réelle ou digitale – il fait en sorte que les gens réalisent que le monde est plus petit qu'il ne semble l'être. En mettant en vedette le skateboard et les tapis religieux, il mélange l'Orient et l'Occident. En ce sens, il est maintenant possible, par exemple, pour des riders californiens de se sentir interpellés par une révolution prenant place au Moyen-Orient, et à l'inverse, pour des habitants afghans de se reconnaître dans le lifestyle skateboard.
Bref, une oeuvre hyper intéressante, et un artiste à suivre si vous ne le connaissez pas!
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